Elle a les yeux grand ouverts d’une jeune fille timide, inquiète, que le monde effraie et attire en même temps. Timide, elle ne l’est plus, ne l’a peutêtre jamais été. Le monde, elle en a tiré son parti, est une grande partie de cachecache entre l’inconnu et le domestiqué. Ses « filles » en attestent : visages naïfs, mélancoliques, un peu de traviole comme on peut l’être dans la vie, sourires absents, sans doute retenus devant la grande question sans réponse de l’existence.
Nous nous rencontrons au Panier Garni, à St Pair, où elle vient de plier une exposition des « filles », ces portraits tout en couleurs qui vous regardent sans faille comme au travers d’un miroir. En toile de fond, des pages de textes imprimés, tirés de magazines de mode des années cinquante, des timbres oblitérés, des collages. Tout regard a une âme.
« Au début, j’ai tenu une brocante en face de la Rafale, dans la HauteVille de Granville. C’était un magasin familial : il a appartenu à ma grande tante qui y tenait un bistrot. Et puis mes parents l’ont transformé en brocante. Je l’ai repris en 2003, d’abord comme brocante et puis la création m’a vite manquée : à la base je suis plasticienne. Alors j’ai aussi mis à la vente des œuvres d’artistes de ma connaissance. En 2010, à la naissance de ma fille, j’ai commencé à lui coudre des vêtements, puis je me suis mise aux accessoires féminins. Je me dirige à présent vers l’art textile car les accessoires, ce n’était pas assez créatif. J’ai fini par fermer la boutique parce que je n’avais plus assez de temps pour créer ».
La création, un leitmotiv dans sa bouche.

« Pour les « filles », ça a aussi débuté avec ma fille : elle prenait des cours de dessins avec Laura Szabo. Un jour elle m’a demandé de dessiner avec elle. J’ai ressorti mes crayons, pris les pages du « Petit écho de la mode » qui était là (je ne sais pas utiliser la feuille blanche !) et j’ai croqué un visage, le premier d’une série de 150 depuis août dernier ». Elles ont du succès, se vendent bien, Véronique a beaucoup exposé, au Panier Garni, au MG Bar au MesnilGarnier, au Samovar à Villedieu, et expose toujours cette série, notamment à l’espace Auriac de St Jean le Thomas avec d’autres artistes pour illustrer la femme jusqu’à la fin avril. Sa fille, sa vraie fille, s’est mise elle aussi à dessiner « des filles », elles exposent toutes les deux à la bibliothèque de Villedieu en juillet et, plus près de nous, à la médiathèque de Percy tout le mois d’avril.